Nº 1 - Automne 1997

Noir sur blanc - In Black and White : Une autre façon de voir


Dès 1962, le président du Sénégal, Léopold Sédar Senghor, avait lance l'idée d'un "commonwealth francophone". Graduellement, l'idée fera son chemin auprès des présidents Habib Bourguiba (Tunisie) et Diori Hamani (Niger).

Un avant-projet d'organisation de la Francophonie est présenté, le 16 septembre 1966, au général de Gaulle. Le projet est accueilli avec réserve par la France qui craint d'être taxée de néocolonialisme.

Graduellement, poussée par la revendication québécoise, la vision du général évolue. Il voit, dans la Francophonie, un moyen de donner " une plus forte impulsion encore à notre grande oeuvre française. "

L'Agence de Coopération Culturelle et Technique voit donc le jour en 1970 sous cette impulsion. Le projet de " commonwealth francophone " pour sa part, ne refera surface qu'en 1975.

C'est le Premier ministre du Canada, Pierre Elliot Trudeau, qui relance l'idée. Le président Senghor s'en fera le porte-étendard aux conférences franco-africaines de 1977, 1978 et 1979 alors mandatées pour é1aborer des propositions de Sommet.

Dans l'esprit du Premier ministre canadien, cette conférence doit regrouper des " pays souverains de la Francophonie et les leaders politiques des pays francophones ". La participation du Québec en tant qu'entité provinciale, ou en tant que gouvernement participant au sein de l'Agence de Cooperation Culturelle et Technique, est donc exclue.

Le gouvernement fédéral désire affirmer sa prépondérance en matière de relations internationales. Il ne veut pas refaire ce que plusieurs appellent " l'erreur de Niamey ", soit redonner le statut de gouvernement participant au Québec.

Le président Senghor suggère la création d'une conférence des Chefs d'État ou de Gouvernement. Cela est inacceptable pour le gouvernement fédéral. Le Québec, pour sa part, revendique sa participation et une représentation distincte du gouvernement fédéral.

C'est donc sur la place qu'occupera le Québec au sein d'un tel regroupement des pays francophones que l'organisation achoppe.

Le feu aux poudres
Depuis la création de l'Agence de Coopération Culturelle et Technique, en 1970, la scène politique canadienne a passablement changé.

En 1976, le Parti Québécois, véhiculant une option souverainiste, est porté au pouvoir au Québec. Cet événement sera le coup d'envoi d'une gérée de " tranchées " entre les gouvernements canadien et québécois, symbolise par la rivalité entre les deux Premiers ministres respectifs, Pierre Elliot Trudeau et René Lévesque.

Cela ne sera pas sans avoir des répercussions au niveau des relations avec la France et la Francophonie.

Dès l'élection du Parti Québécois, le gouvernement canadien pratique une politique dite de " normalisation " des relations France-Québec-Canada. Son désir: rallier les autorités françaises à sa thèse et améliorer les relations Ottawa-Paris.

Le président français, Valéry Giscard d'Estaing, dans la foulée du général de Gaulle et du président Georges Pompidou, poursuit la politique française vis-à-vis du Québec.

Dans une volonté de trouver un terrain neutre, il instaure une politique de " non-ingérence " dans la politique intérieure canadienne et de " non-indifférence " vis-à-vis du Québec.

Les gouvernements canadien et québécois ne pouvant s'entendre sur la place du Québec au sein du Sommet francophone, le président Valéry Giscard d'Estaing en viendra à prendre position en faveur du Québec. Il refuse de participer à un Sommet tant que le Québec n'aura pas trouvé un mode de représentation qui le satisfasse.

La Conférence de Dakar, en novembre 1980, qui devait adopter le projet du président Senghor d'une conférence des Chefs d'État et de gouvernement ayant en commun l'usage du français, est donc automatiquement annulée.

Le gouvernement fédéral dénonce l'ingérence française dans la politique intérieure canadienne. Le gouvernement du Parti Québécois se trouve dans une situation d'affaiblissement vis-à-vis du gouvernement fédéral à la suite de 1'échec du référendum. Le soutien de la France est perçu comme aussi important que le cri du général de Gaulle en 1967.

Nombreux sont ceux qui pensent que l'appui du président Giscard d'Estaing au Québec constitue davantage une excuse pour que le Sommet ne se tienne pas, le chef de l'État français préférant, de loin, le tête-à-tête des conférences franco-africaines. Le projet de Francophonie ne sera pas abandonné pour autant.

François Mitterrand, élu à la présidence de la République française le 10 mai 1981, peu enclin, au départ, à relancer le projet, prendra graduellement sous son aile l'idée d'un Sommet Francophone.

" Le long périple de la participation du Québec à la francophonie ", signé Gabrielle Mathieu
" LA COOPÉRATION MULTILATÉRALE FRANCOPHONE "

1982

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